Aux Crottes, dans la maison de mon père

Dans la maison d'enfance, qui change, qui change, peu à peu, j'ai retrouvé les draps doux de soupline, le café en machine, la télé grand écran et le pot à brosses à dents. Ils rappellent des gestes, figés par le temps, qui se répètent. Si certains resteront, les autres eux changeront.
Dans la maison de Noël et Liliane, les tableaux sur les murs, les pots, les céramiques, les étagères bondées, sont des armoires à souvenir. Ils vivent par eux-mêmes et animent les pièces, chauffées et lumineuses.
Dans la maison des Crottes, les bambous bruissent, les cyprès se balancent et courbent sous le mistral, le bouleau nu et blanc se laisse bercer par le vent, et l'olivier, petit, solide, s'efforce de pousser.
Devant le hameau, la colline du Puy-Sainte-Réparade, piquée de sa Quilho, surplombe la plaine de la Durance, et l'observe, tranquille. Les champs s'étendent, boueux et secs à la fois, entre les talus verts et les arbres épars. Les étangs, frisés par les bourrasques, scintillent sous le soleil pâle de février.
Un ragondin, une poignée de hérons, et des oiseaux qui chantent tout ce qu'ils peuvent de cet hiver finissant, ont froid ; il se réchauffent comme ils peuvent, au fond de leurs nids, de leurs terriers. Et moi, au fond de la maison des Crottes.